Quadriques Architecturales (IV)...

Sphère et Ellipsoïdes


La Sphère :

modèle x² + y² + z² = 1

Sphères d'avant-hier...


L'origine des dômes sphériques est probablement à rechercher dans la mystique spirituelle : reflet de la voute céleste (demeure de Dieu) et symbole de perfection divine ; mais cette forme s'est avérée d'une excellente efficacité antisismique dans les régions fréquemment touchées du pourtour méditerranéen. (Dans un autre registre, l'efficacité fonctionnelle de l'igloo n'est plus à prouver) Les monuments les plus anciens ayant adopté cette forme, et aussi les  plus célèbres, sont par ordre d'apparition le Panthéon de Rome (125), Hagya Sophia (voir aussi ce lien) à Constantinople (532-537) et le Dôme du Rocher à Jerusalem (687-691).

La plupart  du temps, il s'agit cependant d'une calotte sphérique, et non d'une hémisphère.

Istanbul (Turquie)

Dans le cas de dômes "composites", la perception de la sphère est bien plus forte intérieurement qu'extérieurement

Ispahan (Iran), Mosquée de l'Emam

Le dôme extérieur semble construit selon le principe que présente Al-Kashi dans sa Clé de l'Arithmétique. Seule sa partie basse est sphérique; la partie intermédiaire est obtenue par révolution d'un arc de cercle de rayon double, raccordé tangentiellement, la partie supérieure est -sans doute pour des raisons pratiques- un petit cône. La sphère intérieure, en revanche, peut être complète!

On retrouve le même aspect pour des quarts de sphères à l'intérieur des iwans de cette mosquée:


Dans un registre moins grandiose, les petites églises des Cyclades (d'inspiration grecque, c'est à dire Byzantine, pour leur plan cruciforme surmonté d'une calotte sphérique) offrent d'autres exemples:

Santorin (Grece, Cyclades)

Enfin, n'oublions pas le "mobilier urbain", par exemple ce cadran solaire

Ephèse (Turquie)

L'instrument est une image de la sphère céleste, le mouvement apparent du soleil autour de la terre s'y inscrit en suivant l'ombre du style.(Principe dû à l'astronome chaldéen Berose, mort vers 250 av JC).

...et d'après demain

La sphère demeure, grâce aux nouveaux matériaux et aux architectes du XX-ème siècle, un terrain d'innovation architectural: en 1954, Richard Buckminster Fuller inventait le dôme géodésique, qui matétialise une triangulation de la sphère.

                                                              Richard Buckminster Fuller            Pavillon USA, exposition Universelle, Montréal 1967

L'ellipsoïde :

modèle x²/ + y²/b² + z²/c² = 1

Forme beaucoup plus rare, il semble représenté à la cathédrale de Séville (Espagne)

Au delà de l'ellipsoïde :

Pour  l'opéra de Pékin, l'architecte Français Paul Andreu avait d'abord pensé à l'ellipsoïde. Mais le plafond baissant trop rapidement -en quelque sorte!-avec l'équation
x²/ + y²/b² + z²/c² = 1
il a eu l'idée de recourir d'abord au super-ellipsoïde (remplacer l'exposant 2 par 4) ; jugeant le résultat trop plat, il a opté après des simulations sur ordinateur pour un exposant 3,5 (Télérama n°2746, Août 2002)
Toute courbe section plane est alors une courbe de Lamé. Gabriel Lamé (1795-1870) les a introduites en 1828 (avec un exposant m quelconque au lieu de 2) dans son Examen des Différentes Méthodes Employées pour Résoudre les Problèmes de Géométrie.

Selon cette autre page, scientifiquement plus documentée, l'exposant serait 2,2... le Mathouriste attend (avidement!) de trouver d'autres sources pour éclaircir définitivement la question de l'exposant. Paul Andreu aborde brièvement et, si l'on ose dire... elliptiquement la question en 2004, lors d'une
que chacun pourra visionner en suivant le lien; une petite dizaine de minutes après le début, il y déclare:
"C'est une notion un peu confidentielle. C'est un ellipsoïde dans lequel le coefficient de x/a et de y/b n'est pas égal à deux, mais à deux virgule quelque chose... Chaque fois que je cite le chiffre, je me trompe, donc je ne le dirai pas!  Ce doit être 2,3... 2,4, je n'en sais rien.
Mais c'est une forme mathématique pure."

Nous lui pardonnerons le lapsus ( coefficient au lieu d'exposant) pour cette belle conclusion (soulignée par nous). Il est donc probable que l'interview de 2002 ait aussi obéi au principe: "Chaque fois que je cite le chiffre, je me trompe!" 

Apparemment, il a eu un prédecesseur en la personne du Danois Piet Hein (1905-1996), qui a utilisé en architecture l'exposant 2,5. (voir cette page, avec des informations sur les courbes de Lamé)

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