FOURIER... c'est Fou!

De la Révolution Française à la Révolution Numérique

 "Le Panthéon mathématique est peuplé d'ombres bien vivantes qui changent de place au cours du temps, certaines bien visibles et d'autres en retrait. Mon propos était de souligner le retour au premier plan, parmi elles, de Joseph Fourier"

Jean-Pierre Kahane, le Retour de Fourier, 2005

Des Parcours Fourier
pour vos
Journées du Patrimoine


OFFICIEL !!!

FOURIER dans la liste des CÉL
ÉBRATIONS NATIONALES  2018

pour ses 250 Ans !


Tous les évènements à notre accueil ou sur la page "Fourier 250"



Depuis le bicentenaire de la première présentation à l'Académie des Sciences (21 Décembre 1807) de la Théorie de la Chaleur, le Mathouriste rend un hommage (renouvelé à chaque occasion iconographique) à son auteur.

SOMMAIRE:

Cette page est consacrée à une biographie en images de Fourier: on y parcourt ses lieux de vie et de travail, et on y regarde l'histoire des sciences croiser l'Histoire, la grande, dans une période riche en rebondissements: Révolution, Campagne d'Egypte, Empire, Restauration... on termine avec le projet d'érection d'un nouveau monument à Auxerre, pour remplacer celui qui a été sacrifié en 1942, à l'occupant et au tribut imposé de métaux non-ferreux.

Et pour comprendre son œuvre, nous vous proposons une initiation en musique:

Puis une lecture commentée de la Théorie de la Chaleur
Et parce que le traitement du signal qui suit Fourier, c'est encore du Fourier!
Et aussi...
Et enfin, avec une affectueuse pensée pour celui qui fut le premier Président d'Honneur de la Société des Amis de Joseph Fourier:

AUXERRE

Naissance

Jean-Baptiste Joseph Fourier nait le 21 Mars 1768 dans cette ville, qui a si bien su conserver ses quartiers anciens que sa maison natale est toujours là!

La maison natale, la plaque commémorative

L'acte de naissance porte, on le remarquera, les prénoms Jean, Joseph; est-ce plus tard son passage chez les religieux qui l'aménera à préciser sous le patronnage de "quel Saint-Jean" il se place? Peu importe, puisque c'est son deuxième prénom qui deviendra usuel. La famille est manifestement modeste: le père est tailleur, le parrain ne sait pas signer.

Baptisé le jour même!

La rue s'appelait alors Rue de la Parcheminerie; elle a été rebaptisée Rue Joseph Fourier.


Ou encore, si vous la préfèrez la nuit...

Au Collège



Orphelin à huit ans (sa mère décède, son père disparait!), Joseph est recuelli par l'organiste de la cathédrale Saint-Etienne, Joseph Pallais.La proximité de l'instrument aurait pu être le déclencheur rêvé pour l'étude des décompositions et synthèses des ondes sonores (voir notre page d'intiation par la musique); il n'en sera pourtant rien et c'est bien plus abstraitement que Fourier appliquera ce principe musical... à la diffusion de la chaleur. Mais patience! Il n'est encore qu'un enfant doué, qui apprend vite et aime apprendre.

la cathédrale Saint-Etienne, sur la place éponyme... au bout de la rue Fourier!


 
 
Pris en charge par le clergé Auxerrois, il entre, d'abord comme externe, puis, grâce à ses bons résultats, comme interne à titre gratuit, au Collège Royal Militaire d'Auxerre, qui est tenu par les Bénédictins de l'abbaye Saint-Germain. (également sur Wikipedia). Celle-ci domine la ville, et ses bâtiments annexes occupent alors une superficie importante.


Elle domine  le quartier des quais de l'Yonne
(au premier plan, maison du Coche d'eau)
 










L'espace qui sépare le campanile de l'église n'est pas d'origine; il provient de la destruction en 1812, lors de la construction de l'hôpital militaire, de la la partie montrée en gris sur la maquette des bâtiments.


 Il y reçoit un enseignement solide, y compris en Sciences -c'est assez rare, à l'époque- mais cela ne lui suffit pas, et il passe des nuits à étudier en cachette les traités de Bézout et Clairaut: sa vocation mathématique est manifestement précoce! Il écrira un peu plus tard (voir l'extrait manuscrit au paragraphe suivant) :

"Je paye avec usure à Morphée toutes les nuits que je lui ai dérobées à Auxerre..."

Élève à Auxerre de 1777 à 1782 (le futur maréchal d'empire Davout, son cadet de 2 ans, y sera aussi formé), il y revient en 1785... comme professeur, après un complément d'études à Paris.

"A 16 ans 1/2 je fus nommé professeur de mathématiques à l'école militaire d'Auxerre, les mémoires que j'écrivis 4 ans après et que je lus à l'Académie des Sciences de Paris indiquent assez un goût exclusif pour ce genre de recherche."
Fourier, lettre au député de l'Yonne Villetard, 1795

Il aurait aimé alors embrasser la carrière militaire, mais, malgré le soutien de Legendre, il n'est pas autorisé à se présenter le concours d'entrée dans l'artillerie:
"Fourier n'étant pas noble, ne pourrait entrer dans l'artillerie, quand il serait un second Newton!"
Le Ministre de la Guerre, cité par François Arago

Parenthèse à l'Abbaye de Saint-Benoit sur Loire

Pour espérer un avenir, il lui reste... les Ordres, et il sera novice à Saint-Benoît sur Loire, de 1787 à 1789.


La tour-porche
La nef et le chœur Reliques de St Benoît

La règle bénédictine, stricte, rigoureuse,  laissera une trace durable sur sa personnalité: il sera toute sa vie un homme de devoir.  La beauté du lieu, son austère et grandiose simplicité romane sont sans doute favorables à la méditation et au travail, mais est-ce l'idéal pour un scientifique? 

Ci-contre: Manuscrit d'une lettre du 22 mai 1788

Un mathématicien en devenir a besoin de compagnie : celle de confrères, avec qui échanger les idées et critiquer les preuves, et tout au moins celle, précieuse entre toutes, d'une bibliothèque pour bâtir sur des bases solides. Une autre  lettre témoigne de ce douloureux isolement:

"Un malheur bien plus sensible pour moi, c'est le manque de livres. [...] Vous voyez bien qu'il faudrait que j'eusse sous les yeux l'ouvrage de M. Bézout sur [l'élimination]. Seul et sans secours, on peut méditer mais non découvrir: souvent de fuir les hommes on en devient meilleur, mais non plus savant; le cœur y gagne et l'esprit y perd."

Fourier, lettre à Bonard, professeur de Mathématiques à Auxerre , 22 Mars 1789

    Et il ajoute ce Post-Scriptum, où l'ambition le dispute à l'humilité :

"Hier, j'ai eu 21 ans accomplis; à cet âge Neuton et Paschal (sic) avaient acquis bien des droits à l'immortalité."
 Pour lire cette lettre intégralement, complétez la page 1 ci-dessus par les pages 2 et 3, et enfin la page 4 qui se termine sur le post-scriptum
.

Le Mathouriste peut vous présenter ces manuscrits grâce au concours de la bibliothèque municipale d'Auxerre et à Robert Timon, qui a réalisé les clichés pour la Société Joseph Fourier; qu'ils trouvent ici l'expression de nos remerciements.

mais voilà que la Révolution le ramène à Auxerre, lors de la confiscation des biens du clergé décidée par l'Assemblée Nationale en 1790.

Le Temps de la Révolution

Auxerre à l'époque de Fourier

On peut se faire aujourd'hui encore une assez bonne idée de la ville telle que l'a connue Fourier, grâce à l'exceptionnelle conservation d'un nombre important de  maisons anciennes. Le quartier commerçant se tient près de la Tour de l'Horloge (1483), et le bâtiment le plus récent est alors la Mairie (1733).

C'est d'ailleurs près de la mairie, dans la maison la jouxtant immédiatement à gauche, que le père de Joseph tenait son échoppe.



Les quais de l'Yonne sont un deuxième pôle très actif, d'où l'on expédie le vin à Paris par coche d'eau, deux fois par semaine en période de pointe. La vigne est depuis "toujours" -ou tout au moins le début de l'ère chrétienne!- dans la ville même, avec le célèbre Clos de la Chaînette, propriété... des abbés de Saint-Germain.

Entrepôt, place du Coche d'eau
(derrière, Saint-Germain et sa tour carrée)
Clos de la Chainette près de l'abbaye

Entre, des rues étroites et des maisons datant souvent du Moyen-Âge; mais ce qui aujourd'hui est considéré comme un charme attirant de nombreux visiteurs suscite alors moins d'enthousiasme; en 1780, un historien local peut écrire:
"La ville a un air antique et triste, étant toute entière bâtie en bois"

Le vieil Auxerre, dominé par l'imposante cathédrale Saint-Etienne
 

Les Réformes au Collège

En 1790, Fourier revient enseigner dans un collège dont les bâtiments se délabrent de façon inquiétante et où les enseignants manquent, car ni l'état, ni la municipalité ne veulent payer les membres du clergé. Le 30 Avril, "l'abbé Fourier" certifie aux officiers municipaux

"que par respect du décret de l'Assemblée Nationale du 2 Novembre dernier qui suspend l'émission des vœux, il ne les a pas prononcés le 5 du mois, époque fixée pour sa profession; que depuis ce temps, appelé par Messieurs les religieux pour professer les Mathématiques et la Rhétorique il est venu dans cette maison où il s'était rendu utile et porte toujours l'habit religieux."

Le Principal, Dom Rosman, auquel Fourier gardera toujours son estime, a accepté le contrôle du collège par le Directoire de l'administration départementale et lui a présenté un plan de réformes jugé "sage et savant". Un recentrage:
 - des méthodes: moins de mémoire, plus d'apprentissage;
 - et des contenus, où le latin est allégé au profit des langues étrangères et des Mathématiques; il est possible que Fourier ait contribué à l'élaboration du nouveau programme.
Sur le plan matériel,  Dom Rosman a réussi à négocier avec la municipalité le transfert du collège dans des bâtiments assez vastes, en bon état, qui font alors partie de l'abbaye dont ils sont tout proches, et qui accueillent aujourd'hui le lycée Jacques Amyot (sans doute le seul lieu d'Auxerre où l'on enseigne de nos jours, dans ses classes préparatoires aux Grandes Écoles,  la théorie des séries de Fourier!). Le transfert est effectif en 1792.



Curieusement, Fourier n'y enseigne pas les Mathématiques, mais l'histoire et la philosophie; il est vrai que Dom Rosman a le plus grand mal à recruter des professeurs compétents et que, Bonard et Roux pouvant assurer les Mathématiques, il emploie au mieux la polyvalence encyclopédique de Fourier. Celui-ci a aussi créé un cours libre d'astronomie pour les meilleurs élèves.

La Société Populaire et les débuts politiques

Laissons notre héros raconter lui-même comment il vécut les premiers temps de la Révolution:

"Les premiers événements de la Révolution ne changèrent pas ma manière de vivre, mon âge ne me permettait point encore de parler en public[...]. D'un autre côté j'avouerai sans détour que je regardais comme les agitations ordinaires d'un état dans lequel un nouvel usurpateur tend à ravir le sceptre du précédent. L'histoire dira jusqu'à quel point mon opinion était fondée. Les maximes républicaines appartenaient encore à la théorie arbitraire; il ne fut pas toujours possible de les professer hautement. À mesure que les idées naturelles d'égalité se développèrent on put concevoir l'espérance sublime d'établir un gouvernement exempt de rois et de prêtres, et d'affranchir de ce double joug la terre d'Europe depuis si longtemps usurpée. Je me passionne aisément pour cette cause, qui est selon moi la plus grande et la plus belle qu'aucune nation ait jamais entreprise.

Fourier, lettre au député de l'Yonne Villetard, 1795

Prise de la Bastille. (Anonyme, fin XVIIIème siècle)
Musée de la Révolution Française, Vizille

Ainsi, et c'est sans doute un trait de son caractère, s'il ne s'engage pas tout de suite, il n'est en revanche pas question de le faire à moitié ou d'en rester à la théorie lorsque la décision en est prise. On le trouve, en 1792, membre de la Société Populaire d'Auxerre, qui tient ses réunions dans la chapelle du Couvent des Ursulines (bâtie en 1636).


Chapelle des Ursulines et son frontonton Signatures des membres de la Société Populaire.
(
Source: Archives de l'Yonne) 

Face à la formation d'une nouvelle coalition, à qui l'exécution de Louis XVI a donné un nouveau prétexte et à l'insurrection ouverte de la Vendée, la Convention a décrété la "levée en masse", et chaque département doit fournir son contingent au pro rata de sa population. Fourier paye de sa personne... et de ses talents réthoriques:

"Membre de la Société Populaire d'Auxerre, Fourier y exerçait un ascendant presque irrésistible. Un jour, la Bourgogne toute entière en a conservé le souvenir, à l'occasion de la levée de 300 000 hommes, il fit vibrer si éloquemment les mots d'honneur, de patrie, de gloire; il provoqua tant d'enrôlements volontaires, que le tirage au sort devint inutile. A la voix de l'orateur, le contingent assigné au chef-lieu de l'Yonne se forma, se réunit spontanément dans l'enceinte même de l'assemblée, et marcha sur le champ à la frontière."
François Arago,
Éoge Historique de Fourier (1833)


assiette décorée sur le thème de la Levée en Masse,
Musée de la Révolution Française, Vizille


Mais il ne faudrait pas le voir, même pendant la Terreur, comme un béni oui-oui, et il défend avec courage ce qu'il croit juste et humain, au risque de sa propre liberté. Petit échantillon de ce temps mouvementé par lui même, en commançant par un courrier à son fidèle correspondant Bonnard, alors qu'il a été envoyé en mission à Orléans:


Lettre à Bonard, son ancien professeur de mathématiques,
écrite à Montargis, le 4 Brumaire An II (28/10/1793)

(Bibliothèque municipale d'Auxerre)

" Vous aurez pu apprendre que le département du loiret n'est pas absolument tranquille et que la ville d'orléans est un peu agitée. Je ne suis pas étanger à cette affaire  et m'y suis montré conséquent  de la révolution.
J'ai éprouvé comme cela devait être des difficultés que j'ai résolues avec trop de succès pour ne pas irriter mes adversaires. On m'a informé qu'ils allaient me dénoncer [...]. Je désirerais connaître les circonstances et les suites de cette dénonciation qui n'est qu'une bagatelle pour moi et qui, je l'espère, deviendra avec le tems terrible contre ses auteurs."

transcription d'une partie de l'extrait, orthographe d'époque respectée (tems au lieu de temps), sans aucune majuscule -y compris lorsaqu'il signe, voir ci-dessous)
Même lettre, suite

Bagatelle, bagatelle... est-ce son habitude de minimiser les évènements, où ce naturel de diplomate qu'il révèlera plus tard, en Égypte ou à Grenoble?  Il aurait été plus exact d'écrire que le Loiret est absolument pas tranquille (n'oublions pas les mathématiques: les mots eux non plus ne commutent pas!). Orléans est en fait très agitée; quant à la bagatelle, elle va finir par le rattraper et le conduire en prison, et c'est là moindre mal...

"Je puis citer tous les citoyens que j'ai défendus contre des décisions injustes, ceux que j'ai garantis par des avis secrets, ceux qui me doivent la vie ou la liberté. [...]
Vous connaitrez autant que moi, citoyen, les persécutions que j'ai éprouvées deux mois avant la chute du gouvernement que le 9 Thermidor a renversé. Vous savez que la défense peut-être imprudente mais au moins désintéressée que j'osais prendre de trois pères de famille fut la cause de mes disgrâces; poursuivi sur le rapport de Barère, je fus bientôt arrété à Auxerre par deux émissaires de l'ancien Comité de Sûreté Générale dont un a été mis hors la loi le 10
Thermidor. Vous vous rappelez avec quelle ardeur et quelle universalité de témoignages je fus réclamé par mes concitoyens. Mis une première fois en liberté, je fus arrété de nouveau trois jours après pour le même motif et détenu jusqu'au 24 Thermidor."

Fourier, lettre au député de l'Yonne Villetard, 1795

Cela aurait pu très mal se terminer, car l'ordre de remise en arrestation du  23 Messidor An II (11 Juillet 1794) émanait du Comité de Salut Public, signé  de ni plus  ni moins que Couthon, Barère, Billaud-Varennes, Collot d'Herbois, Saint-Just, Robespierre, mais aussi de Carnot et Prieur, les deux scientifiques du Comité, également Bourguignons, mais qui ne connaissent sans doute pas directement Fourier.




Source: Archives de l'Yonne L.-E. Melingue, Le matin du 10 Thermidor (1877)
Attendant leur exécution, Robespierre (gisant, la mâchoire fracassée par une balle), son frère et Saint-Just.
Musée de la Révolution Française, Vizille

Petit rappel du calendrier républicain: le 9 Thermidor, c'est le 27 Juillet: n'était l'encombrement du Tribunal Révolutionnaire, à quinze jours près, on retrouvait dans le fatidique panier d'osier la tête qui devait concevoir un des plus féconds chapitre des mathématiques, avant même qu'il y eût germé! Victor Cousin le rappelle en faisant l'éloge de son prédécesseur à l'Académie Française:

"Peu de temps après son retour à Auxerre, il  fut incarcéré par ordre du Comité de Salut Public. Tout ce qu'il y avait d'honnêtes gens à Auxerre réclamèrent en sa faveur, et  il fut mis en liberté. Huit jours après , nouvel ordre d'arrestation. L'estime dont Fourier jouissait à Auxerre était si grande , qu'une députation officielle de la ville fut chargée d'aller à Paris   mander sa mise en liberté. Saint-Just reçut la députation avec beaucoup de hauteur. Il convint des talents de Fourier, et n'accusa pas même ses sentiments; mais il lui reprocha de la tiédeur. «Oui, dit-il, il parle bien, mais nous n'avons plus besoin de patriotes en musique.» "

Victor Cousin,
Note Additionnelle à l'Éloge de M. Fourier (1840)
Saint-Just, par David d'Angers.
Musée de la Révolution Française, Vizille

Sans le faire exprès, Saint-Just avait trouvé, par cette formule teintée de mépris, le meilleur qualificatif pour celui qui allait fonder... l'Analyse Harmonique. Sauf qu'on allait avoir sacrément besoin de lui!


Avec l'An III et la création de l'École Normale, Fourier va prendre son essor parisien.

PARIS... de jeunesse

l'École Normale

Premier contact en 1795: l'École Normale. Le recrutement des candidats de la première -et glorieuse!- promotion s'est fait sur une base plus citoyenne que scientifique: certes, il faut être capable... mais de quoi? Au moment où le recrutement s'opère, personne ne sait encore que le projet initial va être dévié "vers le haut" par Monge, Laplace et leurs collègues, sous l'impulsion de Garat et Lakanal.(voir notre page Monge).

Le jeune Fourier (dessin de Dutertre fait en Egypte)...
 et le souvenir actuel du décret de l'an III cité ci-dessous

"Article 2:  Les administrations des districts enverront à l'École Normale un nombre d'élèves proportionné à leur population [...]
 Article 3:  Les  
administrations ne pourront fixer leur choix que sur des citoyens qui réunissent à des mœurs pures un patriotisme éprouvé et les dispositions nécessaires pour recevoir et pour répandre l'instruction."


Manifestement, Fourier répond bien à ces deux critères; pourtant il n'est pas désigné par le district d'Auxerre, mais par celui, voisin, de Saint-Florentin, qui a choisi pour deuxième délégué Roux, également enseignant au Collège d'Auxerre.
"Bien informés de la vie, de la pureté des mœurs, du patriotisme, de la capacité des citoyens Joseph Fourier professeur de phisique (sic!) et d'éloquence au collège national établi à Auxerre chef lieu du département et Louis Roux professeur de mathématiques au même collège, après avoir délibéré et entendu l'agent national a unanimement nommé les dits citoyens Fourier et Roux pour élèves à la dite école."
11 Décembre 1794

l'amphithéâtre Verniquet, au Jardin des plantes, à l'époque... et aujourd'hui.
C'est là que se déroulèrent les éphémères cours de l'École Normale de l'An III

En observateur doué d'acuité et de finesse, il dresse un tableau des lieux, de l'ambiance... et brosse une magistrale galerie des personnages. On s'y croirait!


Notes manuscrites de Fourier sur l'École Normale et ses professeurs: Lagrange, Laplace, Monge, ... et les autres !

Fourier est conquis par le style de la nouvelle école, et fait partie de ceux qui peuvent profiter des enseignements dispensés. En témoigne son échange avec Monge lors du premier (11 Pluviose/ 30 Janvier 95) des débats entre professeurs et élèves (une innovation pédagogique!)

FOURIER :  "Après avoir considéré les points, les lignes, les plans, la sphère et la circonférence du cercle, il semble que les définitions de ces divers objets n'aient pas été données d'une manière bien rigoureuse dans les éléments de géométrie ordinaire; et il me semble que, des considérations  qui ont été exposées dans ces leçons de géométrie descriptive, on peut déduire des définitions exactes. Cette remarque peut paraître frivole[...]. Je crois , cependant, qu'il est important de définir bien exactement la ligne droite". [...]
et de proposer sa définition personnelle, en faisant varier la distance d d'un point M à 3 points fixes A,B,C et en étudiant le lieu d'un point M quand d varie...

MONGE :  "Citoyen, la clarté avec laquelle tu viens d'exposer tes réflexions et l'exactitude des observations que tu as faites précédemment sur des objets de physique sont une preuve de la sagacité de ton esprit. La définition que tu viens de donner de la ligne droite est rigoureuse; et l'analogie que tu as remarquée entre cette définition et celles qu'on pourrait faire du plan, de la circonférence du cercle et de la surface de la sphère, a quelque chose de très piquant. Permets moi cependant de te faire à cet égard quelques observations.
Les considérations  dont tu fais usage dans ta définition ont quelque chose de plus compliqué que la ligne droite que tu veux définir; et elles supposent une habitude de la géométrie que l'on ne peut avoir acquise sans la notion de ligne droite".
[...]

Il est intéressant d'observer un Fourier revendiquant la plus grande exigence dans les définitions axiomatiques ( Hilbert ne reviendra-t-il pas sur le sujet?), lui que ses contemporains... et successeurs n'ont guère ménagé quant à ses supposés "manques de rigueur"!

l'École Polytechnique

L'École Normale de l'An III n'aura hélas qu'une brève existence -avant de rennaître définitivement!- mais après quelques vicissitudes, Monge, qui enseigne à l'École Centrale des Travaux Publics (qu'on rebaptisera bientôt École Polytechnique)  "recommande au Conseil le Citoyen Fourier, élève de l'École Normale et très instruit sur toutes les parties des mathématiques. Il pense qu'il serait avantageux de l'attacher à l'École..."
Et le voilà nommé sur un poste qu'on pourrait qualifier de répétiteur. Mais très vite, il est chargé d'un cours d'analyse algébrique. Dès Janvier 1796, il enseigne une partie du cours d'analyse de Gaspard de Prony; en mai il est personnellement responsable d'un cours de calcul différentiel et intégral.

Bustes à l'École Polytechnique:
 Fourier (Hall d'honneur), De Prony (Bibliothèque)




Fourier au tableau, à l'X..
Dessin, probablement par Dutertre
(c'est jusqu'à preuve du contraire, la première image d'un matheux au tableau!)
  "[...] les brillants succès de Fourier à l'École Normale lui assignèrent une place distinguée parmi les personnes que la nature a douées au plus haut degré du talent d'enseigner. Aussi ne fut-il pas oublié par les fondateurs de l'École Polytechnique. Attaché à ce célèbre établissement, d'abord avec le titre de surveillant des leçons de fortifications, ensuite comme chargé du cours d'analyse, Fourier y a laissé une mémoire vénérée, et la réputation d'un professeur plein de clarté, de méthode, d'érudition; j'ajouterai même la réputation d'un professeur plein de grâce, car notre confrère a prouvé que ce genre de mérite peut ne pas être étranger à l'enseignement des mathématiques.

    Les leçons de Fourier n'ont pas été recueillies.
[...] "

François Arago,
Éloge Historique  de Fourier à l'Académie (1833)

Ses cours sont, d'après les témoignages, personnels et minutieusement préparés; hélas, il ne semble pas en subsister de trace écrite de sa main. Sans qu'on en connaisse la raison, ils n'ont pas non plus été publiés, contrairement à la décision fondatrice de l'École, qui imitait en cela l'ÉcoleNormale de l'An III, alors que ce principe a été appliqué aux cours de Lagrange et Prony, strictement contemporains. Toutefois, quelques versions en existent dans les notes prises par des élèves, restés anonymes. Elles sont plus ou moins fragmentaires, mais la plus complète à ce jour fait partie du fonds Joseph Bertrand de la B ibliothèque de l'Institut de France; elle est répertoriée sous le numéro MS2044 et les divers cahiers ont été soigneusement reliés en un volume... sans respect de la chronologie des cours! 
Détail amusant, la première leçon de Fourier (Cours d'Analyse Algébrique) se tient... le 25 Décembre 1795 (4 Nivôse An IV)


Première leçon du Cours d'Analyse: rare "double" datation dans les calendriers grégorien et révolutionnaire
(Bibliothèque de l'Institut de France, Fonds Bertrand)

 La perle du cours de Fourier: e n'est PAS rationnel

Le Mathouriste y a retrouvé un trésor à la fois visible... et bien caché, puisque personne ne l'avait remarqué avant lui: sa fameuse démonstration d'irrationalité de e , qui n'est pas celle qu'on donne très classiquement à partir de son développement en en série, celle "que tout taupin se doit de connaître". Elle lui est, certes, équivalente, mais celui qui la publie en 1815, Janot de Stainville (élève de la promotion 1802 de l'X, devenu répétiteur à l'école en 1810), et en crédite Fourier en écrivant:

 " Cette démonstration m’a été communiquée par M.Poinsot, qui m’a dit la tenir de M. Fourier. "

Janot de Stainville, Mélanges d'Analyse algébrique et de Géométrie (18115)

en donne l'ultime simplification, sans qu'on sache si elle lui est dûe (mais il ne revendique aucune amélioration personnelle), ou si l'initiative vient de Poinsot -élève de cette première promotion de polytechniciens- voire de Fourier lui-même, perfectionnant le cours qu'il redonnera entre 1796 et 1798. Elle remplace celle, très délicate, d'Euler, mais la version princeps de Fourier révèle l'ingéniosité avec laquelle il adapte les idées du maître: il n'y a plus rupture entre les deux méthodes (les fractions continuées d'Euler versus la série entière de Stainville) mais une continuité naturelle, un pont entre les deux techniques.
Vous brûlez de savoir? Evidemment... Suivez ce lien!
(éventuellement, rafraîchissez vous la mémoire sur la présentation de Stainville:  le texte et son analyse sont sur le site BibNum; vous retrouverez cet accès depuis la présentation du travail de Fourier).


aussi dans le manuscrit MS 668
(École des Ponts et Chaussées, très incomplet)

Fourier n'aura pas le temps de s'installer dans la routine: en 1798, l'expédition d'Egypte marque un nouveau tournant de sa carrière. Pour lequel, toutefois, l'École reçoit ordre de lui faciliter les choses, sur le plan de la carrière (conservation du poste) comme du salaire.

Source: archives de l'École Polytechnique:

L'EGYPTE (1798-1801)



La part dans cette page des aventures de notre héros prenait de plus en plus de place...
aussi, pour votre confort de lecture et... de durée de téléchargement, nous avons décidé de lui accorder une autonomie bien méritée! Car elle s'est énormément enrichie en images et documents.

L'Institut du Kaire (sic!), dont il est secrétaire perpétuel, et ses travaux variés, les publications, les expéditions -notamment celle, très riche, en Haute
Égypte... mais aussi les responsabilités de négociateur, avec les autochtones...ou les Anglais, quand il faudra plier bagages!

 Pour suivre les aventures de Fourier en Egypte

CLIQUEZ ICI!!! (et revenez ensuite)




 Pour suivre les aventures de Fourier en Egypte

CLIQUEZ ICI!!! (et revenez ensuite)

On sait comment cela se termine: militairement, par une capitulation, aussi peu glorieuse qu'inévitable. Mais scientifiquement, ce sera, à terme, un triomphe! L'égyptologie vient de naître comme discipline, et qui plus est, discipline scientifique. Quand Champollion, puis Mariette se lancent dans le sujet, puis vont dans le pays, c'est grâce à la voie ouverte par Fourier et ses collègues. La réalisation du canal de Suez s'inscrit dans la lignée de la reconnaissance par les savants de l'ancien canal des pharaons...
... et toutes les découvertes vont être assemblées dnas un ouvrage merveilleux, collationné et amplement préfacé par Fourier!


De retour à Toulon le 19 Novembre 1801, Fourier écrit dès le lendemain à son fidèle correspondant Bonnard:


Lettre à Bonard, son ancien professeur de mathématiques,
écrite à Toulon à son retour d'Égypte, le 29 Brumaire An X (20/11/1801)

(Bibliothèque municipale d'Auxerre)


Mais alors qu'il pense enfin retourner à son poste à l'École Polytechnique, le destin va lui réserver un nouveau caprice.

GRENOBLE (1802-1815)

[ une section qui manque un peu de photos des lieux... merci d'avance à ceux qui pourront aider le Mathouriste qui, il l'avoue, s'est pourtant rendu plusieurs fois dans cette ville... sans appareil photo. Ce que c'est que de ne penser qu'à l'Informatique...]

Le musée de l'ancien evêché conserve un buste de Fourier (merci à François Estève pour sa photo!); c'est un  
marbre de Pierre-Alphonse Fessard (1768-1830),


Buste, Musée de Grenoble
Lettre (personnelle)  à Bonnard, sur papier à en-tête de la préfecture,
datée du 26 octobre 1802 (
bibliothèque municipale d'Auxerre)

le Préfet

À son retour en France, Fourier est persuadé qu'il va reprendre son enseignement à l'École Polytechnique, ses mathématiques... et publier ses travaux

extrait de la lettre à Bonnard (20/11/1801)

Mais c'est sans compter une sorte de convocation adressée, de façon détournée, à Monge:
"Je te prie, mon cher ami, de faire chercher le citoyen Fourier et de l'engager à se trouver chez toi ce soir entre huit et neuf heures. J'ai à lui faire une proposition de la part du premier consul, et c'est un objet qui presse. Je t'embrasse".   signé  Berthollet.
Est-elle du genre qu'on ne peut refuser? Voilà en tout cas Fourier, préfet de l'Isère, quelques jours plus tard... 




Fourier, dans son habit de préfet
(Musée d'Auxerre)
La préfecture est alors située dans l'Hôtel de Lesdiguières
(source de l'image et lien: Wikipedia)
Grenoble: Un parcours "Fourier et les frèes Champollion"
 à découvrir ici.

Ce portrait (attribué à un élève de David, Claude Gautherot,1769-1825) mérite qu'on s'y arrête un peu plus, pour sa mise en scène particulièrement étudiée (non, soigner l'image médiatique ne date ni de la télévision, ni de l'Internet...). D'abord, le visage d'un beau jeune homme en un temps de romantisme naissant: de fait, Fourier a 34 ans lorsqu'il est nommé; les dessins le représentant plus en rondeur ont pour modèle un homme d'âge mûr (éditions posthumes de la Théorie de la Chaleur, caricature des membres de l'institut par Boilly, que nous montrons plus bas). Ensuite, les inévitables attributs de sa fonction: l'habit, le chapeau, l'épée... auxquels il joint une posture bien napoléonienne -vaut-elle allégeance et fidélité? On s'arrêtera davantage sur les livres: là, le choix revendiqué ne fait aucun doute! Derrière lui, Platon et Cicéron marquent son goût pour les humanités classiques; dans sa main, on reconnaît les Principia de Newton, à l'une des figures qui appuient la démonstration du mouvement elliptique des planètes à partir de la loi d'attraction universelle. 



Détails grâce à un cliché de grande qualité de Daniel Reisz; remerciements in memoriam.

Comme à son habitude, il ne s'engage pas à moitié et assume sa nouvelle fonction dans les petites tâches comme dans les grandes.C'est ainsi qu'on le voit se soucier de l'éclairage des rues devant les cabarets... comme de leur nombre excessif, générateur de rixes et de misère familiale!
Les grandes tâches, ce sont l'assèchement des marais de Bourgoin, et surtout la construction de la route Grenoble-Turin. Le préfet ne se contente pas d'arrêter le choix de l'itinéraire dans son cabinet ( ce sera via Bourg d'Oisans et Briançon, et les cols du Lautaret et du Mont-Genèvre);  il est aussi sur le terrain:

 "Le préfet, arrivé au pied de cette montagne, est descendu de sa voiture pour monter à cheval. Il a reconnu par lui-même tout le tracé [...] Il a parcouru la montagne dans toutes ses directions. Il a apprécié les difficultés qu'elle présente à l'art des ingénieurs [...] ; il a jugé que ces difficultés pouvaient être surmontées  par un escarpement dans le rocher qui dirigeait la route nouvelle au milieu des plateaux d'une pente douce et qui sont bien moins élevés que la montagne par laquelle on est obligé de gravir actuellement."
Annales du Département de l'Isère, 18/09/1803



Assèchement des marais de Bourgoin
Plaque décorant le socle de la statue de Fourier à Auxerre (1849)
Le col du Lautaret, ouvert par le préfet Fourier

Voici les 4 plans développant le tracé, tels qu'ils figurent dans les actes du Colloque Joseph Fourier organisé par l'Académie Delphinale (Grenoble 2002). L'annotation sous l'inscription "Plan n°1"  (un peu plus lisible ici en contraste forcé) nous apprend qu'il a été validé le 15 Puluviôse, An XII (5 Février 1804)

détails des plans de la route; tout à droite est inscrit verticalement: côté Grenoble


détails des plans de la route; tout à gauche est inscrit verticalement: côté Grenoble



Son implication, sa fidélité sont récompensées par la Légion d'Honneur en 1804, et un titre de baron d'Empire en 1809. 
Il reste en poste lors de la première restauration, après avoir fait adroitement modifier l'itinéraire de Napoléon vers l'île d'Elbe, qui devait passer par Grenoble: il n'avait guère envie de le rencontrer! Ce n'est que reculer; à son retour, l'Empereur a rencontré à Laffrey les troupes venues lui barrer la route: elles se sont ralliées à lui avec enthousiasme. Fourier essaya vainement d'esquiver une rencontre qui s'annonçait déplaisante:

 "Il fit une proclamation modérée mais loyale, et quitta Grenoble par une porte quand Napoléon y entrait par l'autre. Celui-ci se mit dans une colère extrême en apprenant la conduite de Fourier. Il le fit chercher et voulut l'entendre. L'entrevue eut lieu sur la route de Lyon, dans une mauvaise auberge. Fourier n'était pas sans inquiétude, quand le général Bertrand l'introduisit dans une chambre où Napoléon était étendu par terre sur des cartes, un compas à la main:

«Eh bien, Fourier, vous vouliez donc aussi me faire la guerre! Comment avez-vous pu hésiter entre les Bourbons et moi? Qui vous a fait ce que vous êtes? Qui vous a donné vos titres? Comment avez- vous pu croire que jamais
les Bourbons pourraient adopter un homme de la Révolution?» "

Victor Cousin,
Éloge de M. Fourier (1840)

Fourier ne bronche pas... il est nommé préfet du Rhône! Mais, refusant d'accomplir une épuration qu'on exige de lui, il est aussitôt limogé.

le Savant

Pourtant, tout ceci n'est qu'une partie de l'activité de Fourier!
D'abord, il poursuit sa tâche d'historien. Certes, il a réussi à déléguer la supervision générale de la Description de l'Egypte; l'amour de l'egyptologie cimente son amitié avec les frères Champollion, Jacques-Joseph (dit Champollion-Figeac), puis Jean-François (dit Champollion le Jeune), tous deux résidant aussi à Grenoble.

présentés côte à côte (tout un symbole!) au Musée Champollion des Écritures du Monde à Figeac (Lot):

Fourier, préfet de l'Isére: lithographie de Bailly (1873)
Champollion-Figeac, gravure sur cuivre d'Eugène Champollion
(1879)

Mais surtout, malgré un isolement scientifique total, c'est là qu'il conçoit et rédige ce qui sera l'œuvre de sa vie: la Théorie Analytique de la Chaleur. Quand il n'est pas occupé à ses fonctions, sur le terrain ou dans son bureau , quand les salons de la préfecture ne sont pas le lieu d'inévitables réceptions... ils deviennent le laboratoire de ses expériences! L'espace ne manque donc pas, mais, quand il s'agit des thermomètres, il ne peut guère s'en procurer que quatre...


Expériences sur la sphère (qualité brouillon!)
(
Manuscrit, Source : BnF)
Relevé d'expériences sur la barre (recopie soignée)
(Manuscrit, Source : BnF)

Une première version est lue à l'Académie des Sciences le 21 Décembre 1807: officiellement, c'est pour la bonne cause de la Description de l'Egypte qu'il s'est absenté pour Paris! En germe, tout y est: la Physique avec l'établissement de l'équation de la chaleur, les Mathématiques avec l'introduction de la Série de Fourier. L'équipe des rapporteurs n'est autre que celle des trois mathématiciens-fondateurs de l'École Normale... -ou du fronton de l'École Polytechnique, complétée par Lacroix.

à partir de la gauche, et comme il est inscrit dans les médaillons: Lagrange, Laplace, Monge (puis Berthollet et Fourcroy).
Aucune publication ne suit, contrairement à l'usage. Un bref compte-rendu, pour ne pas dire une paraphrase du début du Mémoire, paraît dans le Bulletin de la Société Philomatique de Paris; il est l'œuvre de Poisson .


Poisson, à l'ENS Ulm
Début et fin du compte-rendu de la présentation de Fourier à l'Institut, par Poisson. La signature se limite à son initiale!

Sans se décourager, Fourier entreprend une correspondance avec Laplace et Lagrange. L'Institut se contente de mettre la question au concours pour son prix à décerner en 1812, en "chipant" à Fourier le titre du mémoire de 1807:
"Donner la théorie mathématique des lois de la propagation de la chaleur et comparer les résultats de cette théorie à des expériences exactes"
Il se remet à la tâche, livre sa copie in extremis: Champollion-Figeac devait l'emporter dans ses bagages en se rendant à Paris, début Septembre 1811, mais le manuscrit n'est pas prêt! Fourier parvient à le lui faire remettre le 17 Septembre, à charge pour son ami de le déposer à l'Académie. Fourier lui a joint ce simple mot:

"Voilà, Monsieur, une des commissions les plus importantes que je puisse donner de ma vie..."
Fourier, rapporté par  Champollion-Figeac in
Fourier et Napoléon, l'Egypte et les Cent Jours, 1844

Mais il n'a pour concurrent qu'un retraité de Bergues (près de Dunkerque) qui n'a à proposer qu'un salmigondis mystique sur l'œuvre du Créateur... Biot et Poisson, rivaux potentiels nettement plus sérieux, ont renoncé à concourir. Du côté du jury, Lagrange et Laplace tiennent toujours la barre, mais, Haüy, Malus et Legendre remplacent désormais Monge et Lacroix. Im rend son verdict le 16 Décembre 1811:
"La commission chargée de l'examen des Mémoires qui ont concouru pour le prix de Géométrie, relatif à la chaleur, propose de décerner le prix au Mémoire n°2 portant pour épigraphe: Et ignem regunt numeri (Plato). Le président ayant fait l'ouverture du billet cacheté joint au Mémoire, on y trouve le nom de Joseph Fourier."


La première page et le fameux épigraphe: "les Nombres régissent aussi le feu"
Que les Hellénistes n'ont...  jamais trouvé à la lettre dans Platon; il a toutefois écrit des phrases exprimant la même idée.



Cela ne va pourtant pas sans réserves; d'étranges réserves, car elles sont bien floues:
"Cette pièce renferme les véritables équations différentielles de transmission de la chaleur[...]; et la nouveauté du sujet, jointe à son importance, a déterminé la Classe à couronner cet Ouvrage, en observant cependant que la manière dont l'Auteur parvient à ses équations n'est pas exempte de difficultés, et que son analyse, pour les intégrer, laisse encore quelque chose à désirer, soit relativement à la généralité, soit même du côté de la rigueur."

Pire: le mémoire n'est pas publié! Fourier se plaint au secrétaire perpétuel, Delambre, dont il obtient cette réponse assez évasive, qui botte à suivre vers les commissaires:


(Source: BnF)

La reponsabilité essentielle en incomberait, selon lui, à Lagrange et Laplace, "les deux autres" (à savoir Haüy et Malus) n'ayant guère pu se prononcer sur les mathématiques.

Jean-Baptiste Delambre
portrait à l'Observatoire de Paris

L'autre histoire, la "grande", se charge de faire différer la publication: à l'automne 1812, c'est le désastre napoléonien en Russie; après la "bataille des Nations" (Leipzig, 1813), la France sera envahie, jusqu'à la première abdication de Napoléon et le départ à Elbe (1814). Le préfet a des tâches plus urgentes à affronter, et ce jusqu'à Waterloo (1815).

Il ne réussira à faire imprimer son traité, indépendamment des Mémoires de l'Académie, qu'en 1822. Il l'ampute volontairement des quelques chapitres qui ne ressortissent pas strictement à la théorie: relevés d'expériences, esquisse d'une application à la chaleur du globe (mais il y reviendra dans deux mémoires séparés!), que ce soit pour resserrer l'objet sur l'unité de thème (une théorie mathématique de la chaleur) -à comprendre comme l'unité d'action dans le théâtre classique,... ou plus prosaïquement pour ne pas allonger un ouvrage déjà épais. Il lui adjoint en revanche une préface d'une vingtaine de pages, intitulée Discours Préliminaire. C'est un propos visionnaire pour deux siècles à venir, et assurément un texte majeur pour la philosophie des sciences. Parfaitement accessible à tout un chacun, car dénué de toute technicité mathématique ou physique. [Le découvrir sur notre site: nous l'avons extrait de l'ouvrage consultable sur Gallica pour un plus grand confort de lecture]

 Pour une promenade dans les manuscrits et l'édition originale,
à la découverte de la Théorie Analytique et des Séries de Fourier

CLIQUEZ ICI!!! (et revenez ensuite)
 Pour une introduction musicale,
et donc toute en douceur mathématique aux Séries de Fourier


CLIQUEZ LÀ!!! (et revenez ensuite)

PARIS... le retour et les honneurs (1815-1830)

Le retour à Paris est difficile, et Fourier va à plusieurs reprises affronter disgrâce et hostilité, lot réservé à tous ceux que la Restauration juge trop liés à l'Empire; préfet, ça ne passe pas vraiment inaperçu... Sa demande de pension est "repoussée avec brutalité" Mais il est tiré d'affaire par un de ses anciens élèves de la première promotion de l'X, compagnon de l'Expédition d'Égypte devenu préfet de la Seine, Chabrol de Volvic.
 
 "Le préfet de Paris, je me trompe, Mëssieurs, un nom propre ne sera pas de trop ici, M. de Chabrol apprend que son ancien professeur à l'École Polytechnique, que le secrétaire perpétuel de l'Institut d'Égypte, que l'auteur de la Théorie Analytique de la Chaleur va être réduit, pour vivre, à courir le cachet. Cette idée le révolte. Aussi se montre-t-il sourd aux clameurs des partis et Fourier reçoit de lui la Direction supérieure du Bureau des Statistiques de la Seine. [...] Fourier répondit dignement à M. de Chabrol. [Ses] mémoires [...]  serviront de guide à tous ceux qui ont le bon esprit de voir dans la statistique autre chose qu'un amas indigeste de chi ffres et de tableaux."

François Arago,
Éloge Historique de Fourier à l'Académie (1833)

NB: comme on le voit ci-contre, Chabrol a "sa" rue à Paris (la plaque touristique rappelle la fameuse affaire du "Fort Chabrol"). Fourier n'a toujours pas cet honneur pourtant largement mérité...  (voir plus bas)

Une première élection à l'Académie des Sciences, en 1816, ne reçoit pas l'approbation de Louis XVIII, mais il lui faut céder devant une nouvelle élection triomphale l'année suivante.



Paris, l'Institut de France
Louis-Léopold Boilly, caricature de Fourier à l'Institut

Dès lors, après la parution en 1822 de la Théorie Analytique de la Chaleur, les honneurs se succèdent: en 1823 il devient Secrétaire Perpétuel de l'Académie des Sciences, membre étranger de la Royal Society à Londres. En 1826, il entre à l'Académie Française (qui s'en souvient!), au fauteuil n°5.

1822, l'affaire du zodiaque: encore un peu d'Égypte!

Les doutes de Fourier sur son  idée première: dater avec précision le zodiaque de Dendérah par l'astronomie, les certitudes de Biot à ce sujet... en tout cas, une question qui passionne le gotha scientifique de l'époque... et attendez un peu que Champollion ait déchiffré les hiéroglyphes!



Qui croire? Premier principe: se méfier des charlatans, ils ne manquent pas:  gare aux astrologues! La beauté et le mystère de l'objet sont un emballage de luxe idéal pour crédibiliser la recherche d'un "avenir écrit dans les étoiles" que le passage à un nouveau millénaire n'a hélas pas rendu caduc... Alors, préférez


Imbroglio au Père-Lachaise



vue générale au rond point Casimir Perier
tombe de Fourier (allée des Acacias)

Après trois derniers mois pénibles -mais il est présent aux réunions de l'Académie malgré ses souffrances- Fourier décède le 16 Mai 1830, à Paris. Il est enterré au cimetière du Père Lachaise, près du Rond-Point Casimir Perier, point de repère très facile à trouver. Sa sépulture est au début de l'Allée des Acacias, à droite du rond-point, et à côté de Jean-François Champollion (qui a explicitement demandé à reposer près de son protecteur)... et non loin de Monge. Au XIXème siècle, contrairement au XXème et au début du XXIème siècles, les plans mentionnaient très clairement Fourier (1851) ou... Fourrier (1875), qualifié dans la légende de fondateur de la doc. phal., en clair de la doctrine phalanstérienne: il est donc évident que l'auteur du plan s'est trompé, et a confondu Joseph avec Charles, père du socialisme utopique (voir plus bas, à propos des rues), enterré au cimetière fe Montmartre.




à gauche, plan de 1851 (source)

à gauche, plan de 1875 (source: Gallica BnF)

surcharges colorées par le Mathouriste





Le monument est d'une grande sobriété, bien en phase avec celle de l'homme de devoir qu'a été, dans tous les épisodes de sa vie, Joseph Fourier. On remarque l'absence de tout signe religieux chrétien, mais la présence du disque solaire ailé, réminiscence de celui qui orne le portail d'entrée du temple d'Horus à Edfou. Il décore aussi le frontispice de la Description de l'Egypte, face à la page de titre, et a été sculpté sur le meuble de rangement de l'ouvrage. Au Père Lachaise, il caractérise le groupe dit "des tombes egyptiennes", parmi lesquelles celle de Monge.

Mais, tout de même! Ne trouvez-vous rien de curieux? Le buste qu'il abrite n'a, de toute évidence, aucun rapport avec le vrai visage de Fourier. Aussi incroyable que cela puisse paraître, c'est celui d'un autre académicien, le docteur François Chaussier, certes lui aussi Bourguignon puisque natif de Dijon... mal replacé après avoir été retrouvé entre deux tombes, vers 1980! (voir cet article, qui rappelle que cette rocambolesque affaire a fait un jour la une de l'Yonne Républicaine.)  Le buste de Fourier avait  disparu depuis longtemps, sans qu'on soit capable d'indiquer une date précise.
Le monument est de plus en très mauvais état, et nécessite une restauration. Mais les choses ne sont pas simples! La Société Joseph Fourier, par l'intermédiaire de son président, a fait procéder à un premier constat d'abandon en Mars 2018, à l'occasion des célébrations des 250 ans du mathématicien. Débuta alors une période 3 ans au cours de laquelle aucune action, fût-elle de consolidation, ne pouvait légalement être faite. Le deuxième constat d'abandon a été dressé le 22 Septembre 2021, ouvrant enfin la voie à une restauration du monument dans son état d'origine, si tout va bien dans le courant 2022, en coïncidence avec la commémoration du bicentenaire de la Théorie Analytique de la Chaleur, l'un des 52 évènements retenus par France-Mémoire pour 2022.

Oui, son son état d'origine, car quelques jours avant cette rencontre, le Mathouriste a retrouvé dans un dossier Fourier, aux Archives de l'Académie des Sciences, les croquis d'architecte, description précise et devis, documents originaux de 1831 (un grand merci au Secrétaire Perpétuel Etienne Ghys, qui lui en a permis l'accès, à leur Conservatrice, madame Maurin-Joffre, et au personnel présent qui ont préparé les dossiers et facilité le travail).
Ces documents, considérés comme très précieux par la Conservation du Père Lachaise car, nous dit sa responsable,"nous avons rarement l’occasion de documenter si précisément un tombeau de cette époque" , vont permettre une prise en charge de sa restauration par le cimetière lui-même qui, ne l'oublions pas, est classé monument historique.



Ce que le monument est (en 2021)...
.... et ce qu'il devrait être! (Archives de l'Académie des Sciences)
détails du décor floral de la base, demeuré bien visible (côté du monument), en dépit de  la dégradation générale.


Ce n'est pas tout: dans le même dossier figurent l'appel à souscription et une liste de ceux qui ont payé leur écot, ou tout au moins annoncé leur intention. Nous avons cerclé de rouge quelques éminents collègues mathématiciens de l'Académie, en bleu les confrères de l'expédition d'Egypte, et en vert quelques autres personnalités importantes, à commencer par les frères Champollion.




L'appel à souscription pour le monument du Père Lachaise (1831) et la liste des souscripteurs
(Paris, Archives de l'Académie des Sciences , avec nos remerciements)

Ci-contre:

250 ans après la naissance de Fourier, dépôt d'une gerbe sur sa sépulture.

Alors qu'un premier constat d'abandon avait été dressé, c'était quasiment la seule chose permise pendant le délai de 3 ans qui courait à partir de ce moment (même une plaque commémorative complémentaire n'aurait pas autorisée pendant ce délai réglementaire!) . La Société Joseph Fourier y était bien représentée, après avoir participé le matin même à une cérémonie à Auxerre.


Ils ont dit de Fourier...

  • Auguste COMTE : "Je ne crains pas de prononcer, comme si j'étais à dix siècles d'aujourd'hui que, depuis la théorie de la gravitation, aucune création mathématique n'a eu plus de valeur que celle-ci, quant aux progrès généraux de la philosophie naturelle ; peut-être même, en scrutant de près l'histoire de ces deux grandes pensées, trouverait-on que la fondation de la thermologie mathématique par Fourier était moins préparée que celle de la mécanique céleste par Newton."                   
  • Victor HUGO : "Il y avait à l'Académie des sciences un Fourier célèbre que la postérité a oublié, et dans je ne sais quel grenier un Fourier obscur dont la postérité se souviendra. "       
(Les Misérables, En l'année 1817)
  • STENDHAL : "Ce petit préfet avec son bavardage infini, arrêtait tout; entravait tout. [...] Une des sources de mon ennui à Grenoble était le petit savant spirituel à l'ame parfaitement petite et à la politesse basse de domestique revêtu, nommé Fourier."
  • Carl  JACOBI : "Il est vrai que M. Fourier avait l'opinion que le but principal des mathématiques était l'utilité publique et l'explication des phénomènes naturels ; mais un philosophe comme lui aurait dû saisir que le but unique de la science, c'est l'honneur de l'esprit humain, et que, sous ce titre, une question de nombres vaut autant qu'une question de système du monde."
  • Lord KELVIN : "J'étais rempli de la plus profonde admiration pour la splendeur et la poésie de Fourier."
  • François ARAGO : "Les progrès de la physique générale, de la physique terrestre, de la géologie, mutiplieront de jour en jour davantage les fécondes applications de la Théorie Analytique de la Chaleur, et que cet ouvrage portera le nom de Fourier jusqu'à la postérité la plus reculée."
  • Rowan HAMILTON : "Les principales théories de l'analyse algébrique [...] doivent être entièrement remodelées, et Cauchy a déjà fait beaucoup pour cette grande cause.  Poisson lui aussi a fait beaucoup, mais il ne me semble pas posséder un esprit assi logique que Cauchy, aussi grands que soient ses talents et sa clarté: et les deux sont à mon avis très inférieurs à Fourier, que je place au sommet de l'École Française des Mathématiques, et même au dessus de Lagrange et Laplace, quoique je situe leurs talents au dessus de ceux de Cauchy et Poisson."

Poème écrit par Hamilton sur Fourier




C. Villani interviewé par l'Yonne Républicaine,
à l'occasion de sa conférence à Auxerre, le 15/03/2018. Cliquez pour la lire en entier!
  • Bernhard RIEMANN : "C'est Fourier qui a, le premier, compris d'une manière exacte et complète la nature des séries trigonométriques. Celles-ci ont été, depuis, employées de diverses manières en Physique Mathématique pour la représentation des fonctions arbitraires, et, dans chaque cas, on s'est aisément convaincu que la série de Fourier convergeait effectivement vers la valeur de la fonction; mais on est resté longtemps avant de pouvoir démontrer généralement cet important théorème."
  • Henri POINCARÉ : "la Théorie de la Chaleur de Fourier est un des premiers exemples d'application de l'analyse à la physique [...]. Les résultats qu'il a obtenus sont certes intéressants par eux-mêmes, mais ce qui l'est plus encore est la méthode qu'il a employée pour y parvenir et qui servira toujours de modèle à tous ceux qui voudront cultiver une branche quelconque de  la physique mathématique."
  • Jean-Pierre KAHANE : "Fourier est une sorte de nom commun, dans tous les sens du terme, pour tous les scientifiques et les ingénieurs, de la génomique structurale à la téléphonie. [...] Sur une période de deux siècles, Fourier a été, de manière étonnamment contrastée, mésestimé et célébré. [...] Si j'en juge par moi-même, je ne lis plus Fourier comme autrefois. Autrefois, avec l'impertinence de la jeunesse et la caution de mes aînés, je le traitais de haut. Aujourd'hui, je cherche ce qu'il veut dire et comment il a pu y arriver si bien."
  • Cédric VILLANI : "Il est dans mon Panthéon personnel.  Fourier, pour moi, ça a d’abord été une théorie : les séries de Fourier. Son analyse a joué un rôle fondamental dans mes recherches. Aussi bien dans mes travaux sur la théorie des gaz que ceux sur la théorie des plasmas, qui m'ont valu la médaille Fields."
Last but not least, plus inédite encore, l'apparition de Fourier dans l'œuvre de ... Jules Verne, dont on sait, il est vrai, combien il se tenait au courant de l'actualité scientifique. Toujours est-il qu'il l'évoque par deux fois (au moins!) dans ses Voyages Extraordinaires:


 "– Alors, reprit Michel Ardan, ne serait-ce pas l’occasion de faire cette expérience que nous n’avons pu tenter, quand nous étions noyés dans les rayons solaires?

– C’est le moment ou jamais, répondit Barbicane, car nous sommes utilement placés pour vérifier la température de l’espace, et voir si les calculs de Fourier ou de Pouillet sont exacts. [...]
   - Mille diables! s’écria Michel Ardan, il fait un froid à geler des ours blancs! 

Barbicane attendit qu’une demi-heure se fût écoulée, temps plus que suffisant pour permettre à l’instrument de descendre au niveau de la température de l’espace. Puis, après ce temps, le thermomètre fut rapidement retiré. Barbicane calcula la quantité d’esprit-de-vin déversée dans la petite ampoule soudée à la partie inférieure de l’instrument, et dit:
     «Cent quarante degrés centigrades au-dessous de zéro!»


  M. Pouillet avait raison contre Fourier. Telle était la redoutable température de l’espace sidéral!"

Autour de la Lune,1869, "suite" du roman De la Terre à la Lune,1865 

Pauvre Fourier! Voilà que lorqu'on ne l'oublie pas... c'est pour montrer qu'il a tort. Et c'est le cas, sur ce point précis! Pouillet, qui est aussi un physicien ayant réellement existé (1790-1868), normalien, considéré comme disciple de Fourier, et Verne lui même, se trompent aussi: on sait aujourd'hui qu'elle est beaucoup plus basse. Pour en savoir plus, voyez donc cet article, paru dans l'Astronomie (n°119, Juillet 2005) de Jacques Crovisier (Observatoire de Paris) qui relit en astronome le roman dont nous extrayons la deuxième citation (et quelques autres):


Pouillet, à l'ENS Ulm

" – Lieutenant, demanda le capitaine Servadac, ne pouvons-nous craindre que le froid ne devienne tel à la surface de Gallia, qu’aucun être vivant ne puisse le supporter ?
– Non, capitaine, répondit le lieutenant Procope. À quelque distance que nous nous éloignions du soleil, le froid ne dépassera jamais les limites assignées à la température des espaces sidéraux, c’est-à-dire ces régions du ciel où l’air manque absolument.
– Et ces limites sont ?…
– Environ soixante degrés centigrades, suivant les théories d’un Français, le savant physicien Fourier.
– Soixante degrés ! répondit le comte Timascheff, soixante degrés au-dessous de zéro ! Mais c’est là une température qui paraîtrait insoutenable même à des Russes."

Hector Servadac, 1874-76

La Gloire tardive du nom... le plus écrit dans le monde des Sciences Contemporaines!

Une postérité scientifique foisonnante

Jean-Pierre Kahane, responsable on ne peut plus autorisé de l'article Séries de Fourier dans l'Encyclopædia Universalis remarque que la première édition ne comportait pas d'article sur Fourier lui-même... et il en fut ainsi jusqu'à la sixième!
L'Université de Grenoble a attendu 1978 pour prendre le nom d'Université  Joseph Fourier, alors que les noms de Stendhal et Champollion avaient été donnés par la ville à des établissements scolaires.

Pourtant, les deux expressions Séries de Fourier et Transformation de Fourier sont employées sans relâche par tous les scientifiques et ingénieurs d'aujourd'hui; leur cursus de formation ne peut "éviter" ces deux notions clefs, et les terrains d'applications sont extrêmement variés. Voulez vous "ausculter" un train d'engrenages sans l'arrêter pour évaluer le risque de casse afin d'intervenir avant celle-ci? FOURIER! Vous cherchez du pétrole en analysant les ondes réfléchies par le sous-sol? FOURIER! Vous avez la vie sauve grâce au scanner médical? FOURIER!
Toutes les photos qui illustrent cette page sont au format JPEG... FOURIER encore! Et, comme dans le cas du scanner, la conjugaison de ses principes et d'un algorithme informatique récent (quoiqu'entrevu par Gauss...), la FFT, autrement dit la Fast Fourier Transform de Cooley et Tukey (1964). Il n'est pas du propos de cette page de détailler tout cela, mais sachez que la rapidité en question ne doit rien à l'évolution des composants des circuits -autrement dit la force brute des ordinateurs, mais à la finesse d'une étude mathématique.

La photo, mythique chez les informaticiens spécialisés dans le traitement de l'image,
du mannequin Lena... et son spectre de Fourier, à peine moins séduisant!

Et puisqu'on parle ici de mathématiques... comment ne pas rappeler que Fourier a ouvert un champ de travail immense pour les mathématiciens. Les problèmes posés par sa série sont responsables de 200 ans d'avancées spectaculaires, incluant de nouvelles et célèbres théories, celle des ensembles et celle des ondelettes, pour n'en citer que deux. Et ce n'est apparament pas terminé!

Quand Paris ne voulait pas se souvenir...ou si peu!

Il n'y a pas de rue Joseph Fourier à Paris. Oui, il y a bien une rue Fourier (13ème arrondissement), mais elle est dédiée à l'autre Fourier, Charles, père du Socialisme Utopique et du Phalanstère. (voir plus haut la citation de Victor Hugo)

Rue Fourier à Paris: la plaque ne permet aucune équivoque.

Qu'on ne fasse pas dire au Mathouriste ce qu'il ne dit pas: en un temps pas si social que ça et qui manque fâcheusement d'utopies, il serait malséant de ... déshabiller Charles pour habiller Joseph!

Est-ce à dire que personne n'a essayé de réparer cet oubli?





Non, bien évidemment. En particulier, pour le bicentenaire de sa naissance, une louable tentative a rappelé, à ceux qui l'auraient oublié, que la France est le pays de Courteline.

Le préfet de Paris est tout à fait sensible à la demande, visiblement formulée par un ami, au nom d'une association d'ingéniérie... en isolation, on ne peut mieux placée pour une demande ès qualité. Mais comme ce n'est pas de son ressort, il ne peut que transférer la demande, en l'appuyant, au Conseil de Paris, qui semble traiter sa file de demandes par ordre, sans distinguer le sérixux du fantaisiste, sans reclasser les dossiers par priorité après un examen rapide... Oui, décidément, Courteline aux pays des Jésuites: on ne dit pas franchement non, mais que ce sera très difficile dans un proche avenir...

Si l'argument était sérieux, la demande aurait eu 7 fois le temps d'être examinée avant qu'une nouvelle demande ne soit formulée pour les 250 ans de Fourier:
en effet 7×7 = 49 < 50

Premier courrier: un préfet soucieux de corriger l'ingratitude de la ville....
... mais un Conseil de Paris qui se retranche derrière le volume des dossiers déjà en attente!

Le postulant eut le sang-froid de ne pas se décourager et de lancer ce qu'on ne nommait pas encore, à cette époque, un "plan B": faire apposer une plaque commémorative à l'emplacement du dernier domicile parisien du mathémarticien. La rue d'Enfer, où il se situait, n'existe plus depuis 1859, date de percement du boulevard Saint-Michel, qui la recouvre en partie tout en rectifiant le tracé. Mais d'après les plans cadastraux, l'adresse de Fourier correspond au 73, boulevard Saint-Michel; à l'angle de la rue Royer-Collard, qui existait déjà à l'époque et a survécu au remaniement hausmannien.Il ne fallait que l'accord des copropriétaires de l'immeuble -sans qu'ils aient à en supporter les frais, précision utile... qui ne rend que plus incompréhensible leur décision!



plan de la Rue d'Enfer en 1857
(fond de carte: Wikimedia Commons)
plan cadastral avec emplacement (actuel)
courrier du Préfet ...
... et refus final

Que croyez vous qu'il advint, en 2018, de la nouvelle demande pour une rue Joseph Fourier? La même réponse, en gros! Espérons tout de même que la très positive évolution pour la restauration de la sépulture marque un tournant dans la reconnaissance urbaine. Honorer un mathématicien ou un physicien n'est peut-être pas tendance (hélas), mais payer tribut au premier qui théorisa l'effet de serre, à celui sans qui les instruments modernes, chargés de surveiller dans l'atmosphère les gaz responsables des changements climatiques, ne pourraient pas fonctionner, ne serait-il pas la moindre des choses? Affaire à suivre...


Mais faut-il que Fourier ait la poisse post-mortem... Il avait été inscrit, pour ses 250 ans, sur la liste des Commémorations Nationales. Le soir de lancement de la campagne, à l'Institut, fut distribué le livre présentant tous les personnages ou événements retenus dans la liste officielle. Fourier y était présenté sur 3 pages (page 1, pages 2&3 ). Hélas, dans la même liste (préalablement débattue, arrêtée et agréée, faut-il le préciser...) figurait Charles Maurras, en quii le talent littéraire se conjuguait indissociablement avec le versant sombre du polémiste violent et antidreyfusard de l'Action Française, qui se rallia à Vichy en 1940 et célébra alors la grandeur de l'Allemagne Nazie. Toutes choses que n'éludait pas la notice, dès la première ligne, mais c'était assez pour susciter une polémique qui enfla... tant et si bien que ceux-là même qui avaint donné le feu vert à la liste et l'imprimatur au livre décidèrent courageusement de le retirer de la vente et de le piloner! Fourier, les Shadocks et Mai 68 ne fiurent donc pas commémorés, le Comité furieux d'avoir été grotesquement désavoué par une volte-face démissionna en bloc (Jean-Noël Jeanneney avait pourtant écit un article très clair: commémorer n'est pas célébrer...)

Ne désespérons pas tout à fait: "France-Mémoire 2022" (nouveau nom des Commémorations Nationales) a inscrit Fourier pour les 200 ans de la publication de la Théorie Analytique de la Chaleur, en même temps qu'un autre bicentenaire, celui de la Lettre à Dacier de son jeune protégé Jean-François Champollion. Il n'y a plus qu'à dire: pourvu que...


Il n'y a certes pas à Paris que des esprits étroits; un ingénieur et un artiste ont relevé le niveau.
Saluons donc, en revanche, la clairvoyance visionnaire de Gustave Eiffel qui, dans sa sélection de 72 noms de savants à graver sur sa tour (1889), retient celui de notre héros.





Tout comme le bel hommage, le plus visionnaire, le plus prémonitoire de l'universalité de Fourier dans les sciences et techniques: il figure en bonne place dans la Fée Électricité, la grande fresque peinte en 1937 par Raoul Dufy, exposée en permanence au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris (qui vient d'être restaurée en 2021):

Fourrier (sic!), reconnaissable à son habit vert d'académicien, aux côtés d'Ohm

Il est dans le groupe "des théoriciens", que Dufy a placé à droite de la Centrale, ceux qui ont mené les recherches pionnières, d'Archimède à Ampère. S'il n'a pas directement travaillé sur l'électricité, reconnaissons qu'il a bien mérité de cette science par ses séries, comme par sa transformation: bien peu d'ingénieurs électriciens pourraient aujourd'hui faire l'impasse, ne serait-ce que sur une seule de ses deux géniales découvertes!

... et Auxerrois

Sur la façade du Palais des comtes (siège du bailliage jusqu'à la Révolution, Palais de Justice au XIX-ème siècle, aujourd'hui utilisé par les services de la Mairie - les deux bâtiments sont quasiment dos à dos!), l'artiste Auxerrois Auguste Michelon grava quelques portraits de célébrités du lieu, en 1869, date de la transformation du palais en musée/bibliothèque. La comparaison entre une carte postale ancienne et l'aspect actuel montre que Fourier n'était pas de la livraison initiale. Prudemment, 3 places avaient été laissées vierges, en sorte qu'il a pu être ajouté ultérieurement, nous allons voir en quelles circonstances.


Mais... que voit-on aussi sur les vieilles cartes postales représentant ce bâtiment? Avez-vous fait attention, à gauche de la précédente? Il y avait une statue, qui a disparu au profit d'un disgrâcieux parking.


Une statue de Fourier, œuvre de l'Auxerrois Edme Faillot (1810 – 1849), qui fut inaugurée le 10 Mai 1849 (Extraits des discours) . Elle représentait le glorieux enfant de la ville en habit d'académicien, un cahier de calculs mathématiques à la main. Il est sans doute juste de préciser qu'elle visait en priorité à célébrer celui qui avait coordonné la  Description de l'Egypte, et siégé à l'Académie Française: l'initiative première (1844), assortie d'un don important, était celle d'un Auxerrois passionné d'Egyptologie; il fut complété par la ville d'Auxerre puis une souscription nationale, lancée par Victor Cousin, son successeur au fauteuil n°5 de l'Académie Française (Lire ce texte intégralement).


Source de ces documents: CCSTI de Bourgogne, avec les remerciements du Mathouriste

Que s'est-il donc passé? Elle a disparu en 1942, impitoyablement fondue par les Allemands pour en récupérer le métal. C'était, hélas, loin d'être un cas isolé: sinistre ironie de l'histoire, celle de Poisson (son rival dans l'étude de la chaleur!), à Pithiviers, connu le même sort; à Paris, 144 statues, dont 65 d'hommes illustres, furent ainsi brutalement rayées du paysage, dont celle de " l'autre Fourier", Charles. L'occupant avait exigé qu'on lui livre certaines quantités de métaaux non-ferreux; toutefois, le choix ne fut pas de son fait, mais de celui du gouvernement de Vichy (sur propositions locales). Les cloches des églises bénéficièrent de la priorité de protection alors qu'elles furent mises à contribution dans d'autres pays occupés (pour en savoir plus sur ce point, consulter l'article  très documenté Vendanges de bronze dans l'Yonne de l'historien Bernard Richard.)
Toutefois, les "négociations" permirent de sauver les deux plaques de bronze ornant le socle, dûes à Raymont Gayrard (1777-1858), que nous avons présentées séparément plus haut, chacune dans son contexte. Elles ont été fixées sur le mur du musée, sous le médaillon, et... sans le moindre panneau explicatif!

Mais qu'allait-on faire à la Libération? Bien sûr, le vœu d'ériger une nouvelle statue... mais comment trouver l'argent dans un pays exangue, où les priorités se bousculent les unes les autres? On opte donc pour une solution plus économique, l'ajout d'un médaillon (bien peu ressemblant!) sur la façade du musée ; il est situé en dessous de celui de Soufflot, l'architecte du Panthéon, également né dans l'arrondissement d'Auxerre. On notera les initiales J.-J., pour Jean-Joseph, strictement conformes à l'état civil, et non à l'usage.

Les plaques décoratives du socle de l'ancienne statue sont bien visibles... mais ne font l'objet d'aucune présentation explicative!

L'inauguration eut lieu le dimanche 9 novembre 1952, avec un discours (à lire sur cette page) du mathématicien Arnaud Denjoy. Ce qui est plutôt remarquable, car c'était l'époque de l'abstraction triomphante, de la "traversée du désert" de l'analyse de Fourier, avant que l'explosion des nouvelles disciplines de pointe: électronique, informatique, télécommunications ne la ramène au centre de l'ingéniérie et des mathématiques elles-mêmes.  (Pour situer: inventé en 1947, le transistor, qui fut le signal de déclenchement de cette révolution, ne vit ses pères récompensés par le prix Nobel de physique qu'en 1956).

Aussi, lorsqu'on songe à la place prise dans le monde des sciences par le nom de Fourier au cours du XXème siècle, qu'aucune restauration de la staute- ou remplacement par une  nouvelle œuvre si l'nsuffisance des données rendait impossible une copie- n'ait été envisagée parait étonnant.  Voilà un défi pour qu'Auxerre se fasse plus belle au XXIème siècle...


Et... ce défi a désormais toutes les chances d'être relevé!

Sur une intiative de Tadeusz Sliwa, professeur des Universités, actuellement directeur du campus universitaire d'Auxerre, une souscription a été ouverte par le Pavillon des Sciences, Centre de Culturel Scientifique, Technique et Industrielle de Bourgogne Franche-Comté, lien) et son antenne d'Auxerre. Le comité de parrainage en a été placé initialementsous la Présidence de Jean-Pierre Kahane, avec le soutien de Cédric Villani, Médaille Fields 2010.
Pour y participer (vos dons seront éligibles aux réductions d'impôts), vous trouverez les détails utiles sur cette page (voir ici la version internationale), ainsi que le bulletin de souscription (version internationale). Cette action est accompagnée par la Société Joseph Fourier, cofondée en Juin 2012 par Tadeusz Sliwa, qui la préside, et le regretté Daniel Reisz, qui nous a quittés fin 2015 et dont ce fut le dernier investissement d'une vie militante en faveur des mathématiques. L'académicien Jean-Pierre Kahane, grand spécialiste de l'Analyse de Fourier, en fut le premier Président d'Honneur; Jean Dhombres a pris en 2017 sa sucession au décès de Jean-Pierre (voir notre hommage)

Le projet bénéficie désormais de solides soutiens:
"Ainsi pensait sans doute M. Gau de Gentilly, qui vient de léguer à la ville d'Auxerre une somme de 4000 francs pour élever une statue à la mémoire de Fourier. Le conseil municipal de cette ville a voté spontanément une autre somme de 3000 francs, pour s'associer à l'idée généreuse  du testateur; mais ces fonds sont insuffisants, et une souscription va s'ouvrir pour achever l'œuvre commencée. Espérons que de vives  sympathies accueilleront ce projet! Fourier n'appartient pas seulement au sol qui l'a vu naître, mais à la France, mais au monde entier."

Le Mathouriste vous tiendra régulièrement au courant de l'évolution du projet.



Cliquez sur l'image pour télécharger le bulletin de souscription!

La médaille créée en 2012 par la prestigieuse association internationale des ingénieurs électroniciens, l' IEEE, qui récompense des travaux de recherche en traitement du signal, est l'une des preuves du rayonnement international de Fourier.

Enfin, Robert Timon, pilier de la Société Joseph Fourier et compagnon de la première heure de son fondateur Daniel Reisz, a conçu un agréable parcours Fourier dans sa ville: idéal pour les Journées du Patrimoine, mais aussi par n'importe quelle journée ensoleillée, il vous permettra en une heure de retrouver, non point en chair et en os, mais "en poutres et en pierres" les lieux marqués par le souvenir de Joseph. La carte et les explications détaillées sont à télécharger ici.


carte seule (cliqueur pour agrandir)

Un Nouveau Buste ...

Et puis, en attendant, une bonne nouvelle: si les bustes de Fourier à l'École Polytechnique et au musée de Grenoble étaient les seuls  à offrir une ressemblance effective (celui du Père Lachaise étant clairement hors-jeu), ce n'est plus vrai depuis l'année 2013: une artiste ayant un atelier dans la région, Nacéra Kaïnou, a été séduite par l'homme Fourier, et en a exécuté un buste en terre cuite; apès avoir été présenté à l'École Polytechnique, il a été exposé dans le cadre des Commémorations Nationales au Muséum d'Auxerre, où de jeunes élèves du lycée Joseph Fourier ont conçu, guidés par leurs professeurs, une mini-exposition...


  


En compagnie du président de la Société Joseph Fourier, Tadeuusz Sliwa.


La vue d'Auxerre (depuis la rive opposée) a été réalisée d'après une gravure contemporaine du savant; elle reflète fidèlement l'étendue de la ville à son époque.

à la mini-exposition du museum d'Auxerre, le 21/03/2018 : pile 250 ans!



... et aussi  dans l'exposition organisée par l'Institut Henri Poincaré:

,


Côte à côte, 4 images de Fourier! De gauche à droite:
  • le buste réalisé par Nacèra Kaïnou;
  • la gravure de Boilly, sur le panneau (la plus connue, sans doute);
  • le portrait en préfet (reproduction photographique sur toile, à échelle réduite);
  • et dans la vitrine, le portrait de Fourier enseignant au tableau, à  l'École Polytechnique (conservé au musée du château de Versailles)


... et un Ancien Portrait Retrouvé!




Fêter les 250 ans de Fourier a donné l'occasion au Museum d'Auxerre de fouiller un peu ses caves... et d'y retrouver un portrait bien oublié, signé de Claude Gautherot, l'artiste à qui on attribue en général le portrait du préfet. Il est évident qu'il montre un Fourier jeune, et a vraisemblablement été peint entre la période révolutionnaire et la nommination à Grenoble. Fourier est-il repassé brièvement dans sa ville natale après son retour d'Egypte? Nous n'en savons hélas rien...

Une chose est certaine: il aurait bien besoin s'une restauration... Y penser est une chose, encore faut-il trouver les moyens financiers de faire effectuer ce travail. Pas de nouvelles depuis!

Fourier par Claude Gautherot, portrait non daté.

Hommages d'ailleurs

Il n'y a pas de timbre de la poste française qui représente Fourier. Mais souhaitons qu'on puisse dire bientôt: "pas encore!", car un dossier de demande a été déposé en bonne et dûe forme auprès de La Poste, en s'appuyant sur l'inscription aux  Célébrations Nationales 2018.
Le Mathouriste a découvert récemment (en cherchant tout autre chose, comme il se doit) que deux pays ont fait mieux que sa terre natale: la République de l'Altaï (membre de la Fédération de Russie) et le Liechtenstein. Bravo à eux!

,  
Altaï 2011 Liechtenstein 2014

Point intéressant, le premier apparait sur cette page, qui présente une histoire philatélique du changement climatique. Plutôt bienvenu, pour rendre justice à un pionnier de l'effet de serre!
En 2018, Fourier aura 250 ans; ce searit une bonne idée si la poste française sautait sur l'occasion.

Références

Biographiques, Historiques

Le Mathouriste doit d'abord payer tribut à l'incontournable somme biographique qui lui a servi de guide pour tisser la trame du texte entre ses photos. En espérant ne pas l'avoir abusivement pillée... et vous donner envie de la lire (elle a plus de 750 pages, donc il vous reste beaucoup à y découvrir, de toutes façons!)


Jean-Pierre Kahane: une vie au service de l'Analyse de Fourier! (Mai 2011, École Polytechnique )
[ voir  notre page spéciale d'hommage à JPK ]
On reconnait au tableau l'évocation de la naissance de la toute première série écrite par Fourier
 dans le Mémoire déposé à l'automne 1811 à l'Académie des Sciences, qui obtiendra le Grand Prix 1812.

Scientifiques

Dire qu'il y a des centaines d'ouvrages consacrés à l'Analyse de Fourier n'est sans doute en rien exagéré.
Une bibliographie choisie est disponible dans la page dédiée à l'apparition des séries dans la Théorie Analytique de la Chaleur,

Oeuvres de Fourier disponibles en téléchargement sur le site de la B.N.F.

 Et aussi...

Aller à la Page: Analyse Harmonique... mais Pourquoi ce Nom?               (Prélude à la Théorie Analytique, #0.1)
Aller à la Page: Analyse Harmonique... en tambours et clarinettes           (Prélude à la Théorie Analytique, #0.2)
 
Aller à la Page célébrant la Naissance des Séries de Fourier            (Promenade dans la Théorie Analytique, #1)
Aller à la Page: l'Armille, la Sphère, le Cylindre et les Autres...       (Promenade dans la Théorie Analytique, #2)
Aller à la Page: Naissance de la Transformée de Fourier                  (Promenade dans la Théorie Analytique, #3)

Aller à la Page: Naissance de la FFT: Fast and Fourier !                (Promenade dans... la suite de l'histoire, #4.1)
Aller à la Page:  Signaux, Transformées... et Applications               (Promenade dans... la suite de l'histoire, #4.2)
Aller à la Page:  
Cristallographie, Optique, Spectroscopie...          (Promenade dans... la suite de l'histoire, #4.3a)
Aller à la Page:  
Spectroscopie par FFT en exploration spatiale    (Promenade dans... la suite de l'histoire, #4.3b)
Aller à la Page:  Brève Histoire des Séries Trigonométriques         (Promenade dans... la suite de l'histoire, #4.4)
Aller à la Page:  De Gabor aux Ondelettes                                           (Promenade dans... la suite de l'histoire, #5)
 Aller à la Page:  De Pythagore à Parseval                                         
  (Promenade dans... la suite de l'histoire, #6)

Aller à la Page:  du Refroidissement  de la Terre à l'Effet de Serre      (En lisant les Mémoires de 1824 et 1827)
Aller à la Page: Kelvin, l'Analyse de Fourier et les Marées          (En bord de mer...avec de Belles Mécaniques!)
Aller à la Page: Séries et Modes Propres, Applications Modernes    (Pré/postlude à la Théorie Analytique, #0.3)
       Aller à la Page: Fourier, père de l'Optimisation Linéaire          (Promenade dansles sommets... avec Giacometti!)
Aller à la Page: Fourier, Théoricien des Nombres                                       (e est irrationnel... sa VRAIE preuve !)

Aller à la Page: Hommage à Jean-Pierre Kahane                                                                 (une vie pour Fourier...)


 
     

Revenir à la Home Page du Mathouriste